Fonds Jacques Martel : Pouvez-vous nous parler de la mission principale de votre association et des problèmes spécifiques qu’elle cherche à résoudre ?
Marie-France Barrier : Des Enfants et des Arbres est née avec l’envie de répondre à un objectif précis : créer une synergie entre le monde agricole et les jeunes.
D’un côté, notre souhait est de revitaliser et de ré enraciner le monde agricole, de le remettre au cœur du collectif. Quant aux jeunes et au monde de l’éducation, nous pensons qu’il est essentiel de connecter les citoyens de demain avec leur territoire et leur alimentation ; leur montrer leur capacité à être des acteurs décisifs du changement.
Et l’arbre dans tout ça ? C’est un trait d’union, qui a de nombreuses vertus tant au niveau environnemental (hausse de la matière organique, réduction du stress hydrique, biodiversité, …) que social, puisque c’est également un trait d’union entre les producteurs et les consommateurs, et un trait d’union entre les différentes générations.
FJM : Comment votre association utilise-t-elle les fonds et les dons qu’elle reçoit pour mettre en œuvre ses projets ?
MFB : L’ensemble des dons collectés sont directement redistribués pour la mise en œuvre des plantations. L’association assure le rôle de relai.
Ils servent à rémunérer les opérateurs techniques, qui suivent les projets, les fournitures (arbres, protections…), les travaux de préparation des sols, l’encadrement technique le jour J, mais aussi le pôle pédagogique qui accompagne l’ensemble des acteurs (agriculteur et équipe éducative) tout au long du projet en créant du contenu pédagogique ergonomique notamment.
Il faut toujours avoir en tête que c’est une aventure de territoire, d’acteurs locaux qui jouent à domicile. La vocation nationale de l’association ne doit pas prendre le pas ; cette dernière est au service de la relation entre les enfants et l’agriculteur.
Et à ce titre, les retours des techniciens sont très plaisants ; ces plantations affichent des taux de reprise parmi les meilleurs parce que les agriculteurs sont particulièrement attentifs ; ils ont une responsabilité vis-à-vis des enfants qui veulent voir leurs arbres grandir.
FJM : Comment votre association maintient-elle le lien avec ses donateurs et sa communauté ?
MFB : Actuellement, l’association produit une newsletter environ tous les 2 mois. Nous sommes également actifs sur les réseaux sociaux pour donner à voir ce qu’il se passe dans les champs des agriculteurs dont nous soutenons les projets. Et ils publient beaucoup ; là encore nous avons donc un travail de relai !
Une fois par an, Des Enfants et Des Arbres organise une plantation guide, pour les mécènes, pour se retrouver en plein champs ! Nous avons pour objectif de multiplier ce genre d’événements dans les territoires. Pour créer du mycélium (restons dans le thème !), avec et entre les mécènes. Notre relation avec les mécènes va au-delà de l’administratif ; c’est une histoire humaine.
Enfin, nous avons également développé un dispositif en ligne afin d’être le plus transparent possible sur les projets. Le mécène peut voir tout ce qu’il se passe sur le projet qu’il désire soutenir. Il peut communiquer directement avec l’agriculteur, se tenir informé du suivi de la plantation. De manière générale, nous encourageons aussi l’autonomie des mécènes.
FJM : Si votre association était un élément naturel, lequel serait-il ? Et quelles seraient ses propriétés bienfaitrices ?
MFB : Un arbre évidemment !
L’arbre est notre totem ! Il est à la fois inspirant, une raison d’être, un lien, un outil, il est ultra généreux et humble.
La devise de l’association est « humus, humanité, humilité ».
C’est tout à fait en lien avec l’arbre qui crée de l’humus et le redistribue. Ce n’est pas tout, il lutte contre l’érosion, capte le CO2, offre le gîte et le couvert aux auxiliaires, ré-enchante le paysage…
L’équipe a pris l’habitude de se référer à l’arbre, qui fait partie intégrante de sa raison d’être. Comme lui, l’association reçoit pour redistribuer, en toute humilité, une valeur très importante pour l’équipe.
FJM : Si votre association était une émotion, laquelle serait-elle ? Et comment cela se traduirait dans votre engagement ?
MFB : La joie ! Parce que, ce qui nous rend joyeux en tant que faiseurs, c’est de recevoir des témoignages de joie, qui fertilise les imaginaires en plein champs.
La joie c’est une émotion juste, comme un curseur, qui prouve que l’on est au bon endroit, au bon moment. La joie n’est pas un élément quantifiable, dans les bilans… Mais c’est néanmoins le plus important, la joie d’être ensemble, de valoriser ces acteurs cruciaux (agriculteurs et citoyens de demain) et leur donner foi en demain et en le collectif.
FJM : Si votre association était un objet du quotidien, lequel serait-il et comment serait-il utilisé pour aider les autres ?
MFB : Le couteau-suisse.
Des Enfants et des Arbres, c’est un outil ultra ergonomique au service des acteurs du territoire, qui doit s’adapter à leurs besoins (différents) et doit être facilement saisissable par tous. Toutes les pognes doivent pouvoir se saisir de l’outil Des Enfants et des Arbres. C’est notre objectif !
FJM : Si votre association était un super-héros, quel serait son pouvoir spécial et comment l’utiliserait-elle pour le bien ?
MFB : Cela pourrait être l’arbre, mais j’en ai déjà parlé. Je vais donc choisir le Ver de terre ! C’est un super anti-héros.
Pas très beau, peu ragoutant, flasque… il ne bénéficie pas d’une aura incroyable. Et pourtant c’est un Grand Ingénieur de la Vie. Il participe à créer de la fertilité en souterrain et on ne peut pas se passer de lui.
A priori on n’est pas très ému de leur disparition ; il faudrait l’être davantage.
Et ce qui est très beau c’est de voir comment le regard des enfants à son encontre évolue au cours d’une plantation. Petit à petit, ils comprennent que c’est leur allié, et qu’au cours d’une plantation ils doivent faire équipe avec lui, avec la diversité du vivant. Une belle découverte de l’altérité.
FJM : Si votre association était une citation inspirante, quelle serait-elle et comment la mettriez-vous en pratique dans vos actions ?
MFB : « Tant que nous ne nous engageons pas, le doute règne, la possibilité de se rétracter demeure et l’inefficacité prévaut toujours.
En ce qui concerne tous les actes d’initiatives et de créativité, il est une vérité élémentaire dont l’ignorance a des incidences innombrables et fait avorter des projets splendides. Dès le moment où on s’engage pleinement, la providence se met également en marche. Pour nous aider, se mettent en œuvre toutes sortes de choses qui sinon n’auraient jamais eu lieu. Tout un enchaînement d’évènements, de situations et de décisions crée en notre faveur toutes sortes d’incidents imprévus, des rencontres et des aides matérielles que nous n’aurions jamais rêvé de rencontrer sur notre chemin.
Tout ce que tu peux faire ou rêver de faire, tu peux l’entreprendre. L’audace renferme en soi génie, pouvoir et magie.
Débute maintenant. »
Johann Wolfgang Von Goethe
Écouter ses rêves est très important ! Je l’ai fait. Les agriculteurs le font. Même s’ils sont improbables, il faut avoir l’audace de les écouter et de les cultiver. Des Enfants et Des Arbres accompagne ces rêves.